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Ma cabane en Guyane
9 juillet 2007

le colloque de la francophonie s'en est allé...

... et les acteurs semblent avoir apprécié l'accueil qui leur a été réservé...

Je ne sais s'ils ont autant "savouré" que moi la table ronde consacrée à la littérature et la société en Haïti ; c'est la seule à laquelle je pouvais assister, et cela tombait bien. Haïti m'interpelle beaucoup, d'une part par sa déshérence actuelle - et ancienne ! - terriblement dramatique, d'autre part parce que j'ai une amie haïtienne, et enfin parceque j'avais préparé en 2004 une expo sur le pays à l'occasion du bicentenaire de son indépendance. Je me souviens très précisément de la question posée par une jeune femme à qui je commentais les panneaux : "et vous, depuis combien de temps n'êtes vous plus esclave ?"...

Pour animer cette table ronde, "la parole circulait" entre trois acteurs principaux et la salle. Les trois "meneurs" étaient haïtiens : Lionel Trouillot, écrivain reconnu et engagé (bicentenaire, thérèse en mille morceaux...), Michel Jean-Louis, fondatrice et animatrice de l'association Fokal, qui anime la lecture publique en Haïti, et la jeune Elvire, dont j'avoue ne point me souvenir du nom de famille... Lionel Trouillot et Michel Jean Louis ont fait chacun une présentation intéressante expliquant leur travail et le tissage entre littérature et la société. "Elvire", jeune poétesse, a été plus brève, lisant - oserais-je dire de façon emphatique ? - une de ses poésies et se mettant ensuite très fort en colère en se remémorant sa stupéfaction en entendant le commandant de l'avion descendant sur Cayenne "Nous arrivons à l'aéroport de cayenne-Rochambeau" : certes, chacun peut comprendre l'ire des haïtiens. Donatien de Rochambeau fut en effet un des militaires les plus violents et cruels contre les noirs du pays, et il est évident que de nombreux guyanais - dont christiane taubira - ont tenté de remédier à cette dénomination quelque peu déplacée !

Ceci dit, pour répondre à la question d'Elvire, un jeune homme tenta de répondre - maladroitement, sans doute - que le rochambeau en question était le fils du précédent, "bon maître" d'esclaves guyanais, apprécié de ceux-ci... de nombreuses réactions dans la salle lui répondirent donc... L'abominable "maître" français n'est point à l'origine de ce choix, mais les américains, qui construisirent l'aéroport après la dernière guerre et le baptisèrent ainsi en souvenir du compagnon d'armes de La Fayette.

Mais de cette première "déviation" (parce qu'on était loin quand même du thème de la table !) découlèrent d'autres, alimentées partiellement par la poétesse, qui fit état de propos racistes à son endroit, par rapport à la couleur de sa peau, propos naturellement relayés par certains assistants. Une personne blanche et une guyanaise finirent par craquer, considérant que les propos étaient déplacés, qu'il fallait de tenir toujours ce même langage guère constructif... A moi, cela ne put qu'évoquer une conférence débat dont j'eus l'occasion de parler en son temps, "l'image du noir dans la société française d'aujourd'hui", qui avait immédiatement mis en exergue la façon lamentable dont étaient considérés les noirs en France, lesdits noirs préférant revendiquer le terme "nègres" (alors que je suis certaine que la plupart des locuteurs mettent plus de respect dans la dénomination "noir" que "nègre"...).

Lionel Trouillot prit la parole, considérant que les deux dernières intervenantes n'avaient rien compris au débat. Ah bon ? Mais alors, donnez nous le bon dictionnaire, s'il vous plaît !!! il nous aidera à vous mieux comprendre, ce qui est souvent impossible.

Enfin, ce n'est pas dans ce sens qu'il faut dire les choses. J'ai plutôt le sentiment que le passé reste si présent que, quoique puisse énoncer tout homme de bonne volonté, animé d'esprit d'entreprise et de dynamisme, sa couleur blanche le dessert tant et tant qu'il n'est même pas question de l'entendre, de lui parler, de lui accorder le moindre crédit...

J'étais très en colère en sortant de cela, quoique """satisfaite""" d'avoir pu entendre une fois de plus ce type de langage et de constater que malgré tout des gens droits et sincères tentaient de recadrer le débat. Je suis profondément triste aujourd'hui d'avoir le sentiment que, pour certains, ce type de langage est comme un roc dont ils ne doivent sous aucun prétexte se décrocher. Par peur de renier leurs ancêtres esclaves, peut-être ? N'y aurait-il pas d'autres manière de leur rendre hommage ?

La fraternité est une notion fragile. Je pense qu'il faudrait pourtant apprendre à vivre ensemble : nous sommes censés composer une société mondiale... N'en détruisons pas le moindre effort de construction, un puzzle de millions de pièces a besoin de chacun de ses petits bouts...

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